Ceci
n'est pas ICO II
ICO
reste l'une de mes expériences vidéo-ludique les plus marquantes
ces dernières années. Souvenez-vous, il s'agissait d'un jeu mêlant
plate-forme et exploration dans un monde immense et calme. Une perle de douceur
dans l'univers des consoles envahi par les FPS, les bagnoles et le foot. On
conduisait un jeune héros prenant par la main une princesse pour la sortir
d'un château gargantuesque, une sorte de fable poétique rehaussée
par une réalisation technique incroyable sur PS2.
Aujourd'hui l'équipe responsable de ce bijou propose enfin sa nouvelle
production, Shadow of the Colossus. Même si on retrouve leur "patte"
inimitable, SotC n'est en rien une simple suite d'ICO. Là où nombre
de développeurs se seraient contenté d'implémenter quelques
nouveautés à leur concept unique, les auteurs japonais de Sony
ont encore choisi d'innover, et en beauté s'il-vous-plait !
L'histoire débute alors que vous déposez une jeune femme, morte,
sur l'autel d'un caveau monumental creusé à même la roche.
C'est le seul lien avec le jeu précédent, puisqu'on peut y voir
une sorte de transition, le héros ressemblant un peu au gamin d'ICO qui
aurait grandi. Vous êtes un solitaire exilé en terre inconnue,
interdite, venu accompagné par votre fidèle destrier pour entreprendre
de ressusciter la morte. Pour cela vous apprenez qu'il vous faudra terrasser
les monstres mythiques qui parcourent le vaste monde. Les fameux "Colossus"
donc, 16 créatures titanesques que vous devrez affronter avec pour seules
armes une courte épée, un petit arc et beaucoup de jugeote ;-)
Instantanément j'ai retrouvé l'univers singulier qui m'avait séduit
dans ICO, une impression de gigantisme, de liberté totale, une atmosphère
de contemplation. Oui, Shadow est un jeu pour les rêveurs, les explorateurs.
Nous reviendrons sur ses graphismes et ses sons exceptionnels.
Les concepts qui régissent la terre de SotC sont relativement simples,
le joueur dispose dès le départ de tous les éléments
lui permettant de partir à l'aventure. L'interface est épurée,
une barre de vie, un cercle de "force", une icône représentant
l'arme portée. Un stick permet de se déplacer, l'autre gérant
la caméra, un bouton pour l'attaque, un pour le saut, R1 pour s'agripper,
L1 pour verrouiller une cible. C'est tout. Pas besoin de maîtriser des
combos avec 12 doigts ;-) Maintenant que la donzelle repose dans son tombeau
temporaire, que faire me direz-vous ?
A
l'assaut des forteresses mouvantes
Aucune
barrière artificielle ne nous bloque, alors comment trouver notre premier
Colosse dans l'immensité ? Il suffit d'écouter l'indice donné
par la voix céleste et si cela ne suffit pas, de brandir votre épée
qui vous indiquera la direction à suivre d'un rayon lumineux. Pour franchir
les larges étendues votre cheval est d'une grande aide, la manière
dont on le dirige fait preuve d'un grand réalisme. On ne "contrôle"
pas l'animal, on doit juste se servir de la bride pour lui indiquer une direction,
avec des petits coups de talon pour le faire accélérer. On sent
vraiment un animal vivant grâce aux animations. J'ai ainsi passé
le premier quart d'heure du jeu à chevaucher dans la pampa, sans but
précis ;-) L'occasion d'admirer les paysages, le regard portant loin
à l'horizon. Sans aucun temps de chargement, précisons-le, ce
qui est un véritable exploit vu la grandeur des lieux.
Mais bientôt le désir d'un peu d'action prend le joueur, l'envie
de se mesurer à ces fameux géants. On va là où la
lumière de notre épée nous porte. Un peu d'escalade, et
bientôt le premier colosse se dévoile. Quel choc mes aïeux
! Une montagne noire proprement dantesque, qui se déplace lentement vers
vous, de toute sa lourdeur, soulevant des tonnes de poussières ! Ça
ressemble à un boss de fin de jeu, sauf que c'est précisément
le premier ennemi que vous rencontrez ;-) Le temps de ramasser sa mâchoire,
on commence à essayer d'élaborer une stratégie d'approche.
Tout le sel du jeu vient de votre capacité à trouver le(s) point(s)
faible(s) de l'opposant. Par quel bout "escalader" l'ennemi ? Comment
grimper sur cette masse impressionnante en mouvement ? Içi
entre en compte le fameux "cercle de force", il représente
la durée durant laquelle vous pouvez vous maintenir sans lâcher
prise. Une fois que vous avez pigé où se situe l'endroit "accessible"
du géant, vous débutez votre lente ascension. Le premier colosse
sert de tutorial, il suffit de sauter sur l'un de ses sabots où des bordures
sont sculptées, donnant une prise au héros. Ensuite il faut localiser
le(s) tatouage(s) lumineux du monstre pour le(s) frapper de votre épée.
Les monstres suivants deviennent de plus en plus retors, pour l'un d'eux par
exemple il vous faudra l'attirer près de l'entrée d'une grotte
afin qu'il se penche vers vous et que vous saisissiez rapidement sa barbe !
Chaque challenge est un véritable puzzle, et on croise tout le bestiaire
imaginable en taille XXXL : humanoïde, minotaure, araignée, oiseau,
poisson, etc. Certains des colosses sont armés ou crachent des boules
d'énergie. Comptez une demie-heure environ par rencontre, une fois votre
adversaire vaincu le héros se trouve automatiquement ramené dans
le château principal, au centre de la carte.
Ambiance
Comme
avec leur jeu précédent les auteurs jouent beaucoup sur l'ambiance
unique. Des jeux de lumières et d'ombres dans de vastes décors,
le vent, le ciel aux nuages tournoyants, des sons et une musique qui plongent
le joueur dans un univers "réel". Les paysages changent fréquemment,
depuis les terres arides, ocres, ensoleillées aux labyrinthes de pierres
sous-terrains, des sous-bois ombragés aux bords de lacs paisibles. L'architecture
des bâtiments, ponts, aqueducs, ruines, tours, permet toutes les folies
dans les possibilités d'exploration. Notre héros est un gymnaste
accompli, et bien souvent il faudra passer un certain temps à franchir
les obstacles vous séparant des larges terrains de jeu des colosses.
Pour l'anecdote et presque comme un pied de nez aux autres productions, les
auteurs ont inclus quelques possibilités d'améliorer un peu sa
barre de vie et de force, en chassant les lézards ou en cueillant des
fruits à coup de flèches ;-) Amusant pour le fan transit qui veut
visiter chaque recoin de ce pays imaginaire. On croise parfois des points de
sauvegarde sous la forme de Pierres de prière, leur intérêt
est assez relatif puisqu'une sauvegarde automatique est possible après
chaque titan vaincu.
Shadow of the Colossus est une nouvelle fois un coup de maître de la part
de Sony. Un jeu solo très original, impressionnant techniquement sur
une PS2 en fin de carrière. Prise en main aisée, plaisir de la
découverte, gameplay simple et fun, difficulté progressive, c'est
bien tout ce qu'on demande à un jeu vidéo. Comme pour ICO il faut
impérativement résister à l'envie de consulter une FAQ
sous peine de réduire encore un peu plus la durée de vie déjà
assez courte. C'est mon seul regret, formulé sur ICO en son temps, que
les auteurs n'aient pas inclus encore plus de possibilités et de "replay-value".
Une fois le jeu terminé seuls les modes "hard" et "time
attack" apparaissent, avec une quinzaine d'objets bonus pour qui arrive
à battre les records. J'imagine à peine ce que les auteurs auraient
pu mettre en place s'ils avaient eu plus de temps, surtout avec ce magnifique
cheval galopant. Shadow of the Colossus est une oeuvre d'art, en cette qualité
il ne pourra être appréciée par le commun des joueurs. Si
en cette période de fête proche vous pouvez vous le faire offrir
(rappelons qu'il s'agit d'un import USA), n'hésitez pas !

Jeu fini :
Comme prévu la durée de vie de SotC n'est guère conséquente,
comptez entre 8 et 12 heures suivant vos envies de ballades. Mais quel gameplay,
quelle expérience intense ! Les colosses ne cessent d'être de plus
en plus retords, certains jouent sur leur petit gabarit pour vous surprendre
par leur vitesse, d'autres sont carrément tellement imposant qu'on tourne
autour pendant 20 minutes avant d'envisager une astuce pour leur grimper dessus.
On doit souvent évaluer le décor alentour pour comprendre comment
vaincre l'ennemi. Et quel final majestueux, le dernier colosse gigantissime,
et le coup de théatre lors de l'épiloque ! Magique. Deux modes
de jeu supplémentaires font leur apparition une fois le jeu terminé,
dont un "time attack" qui donne des objets. Allez, on se lève,
on éteint son ordinateur, et on cours acheter ce jeu, nomdediou !