THE WITCHER
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Testé le Gégé l'embrouille chez les bouseux "Witcher, sa reum, il ambiance trop !" me soufflait encore hier ma concierge. Qu'elle a raison, la bougresse. Il faut dire que depuis quelque temps une douce routine berce le Rôliste PC : attendre le nouveau "Elder Scrolls" made in Bethesda, s'y plonger avec délice (souvent) ou déception (parfois), puis passer le reste de l'année à jouer aux adaptions de RPG XBox de Bioware, toujours plus ou moins mal fichues pour le combo clavier-souris. Parfois une surprise survient, une production indépendante pleine de bonne volonté mais bugée jusqu'à l'os qui empêche de pleinement l'apprécier (Two Worlds, pour ne citer que la plus récente). Mais aujourd'hui l'affaire qui nous concerne est différente. "The Witcher", que l'on surveillait du coin de l'œil sans trop y croire, est clairement ce qui est arrivé de mieux dans le Jeu de Rôle PC depuis des lustres. Non pas que ce jeu révolutionne en quoi que ce soit le genre très codifié du RPG Médiéval-fantastique. Mais "The Witcher" est tout simplement un cran au dessus à tous les niveaux : gameplay audacieux, interface efficace, univers original, histoire passionnante, technique solide (performances et stabilité). A tel point que l'amateur, pris au dépourvu, se retrouve tremblant d'émotion, les mains moites et les pieds poites, tout frétillant de tomber sur cette production épatante face à la déferlante de FPS envahissant nos machines octo-processeurs quadri-SLI de cette fin 2007. Le scénario d'abord, tiré d'une collection de nouvelles d'un auteur Polonais (Andrzej Sapkowski). Une saga moyenâgeuse mettant en scène un redoutable guerrier mutant nommé Geralt, un des plus puissants "Witchers" de la contrée. Cette caste d'humains surentraînés et dopés comme des joueurs de foot est censée s'occuper de toute la vermine du pays : goules putrides, insectes géants, monstres fantomatiques et candidats de télé-réalité. Petit problème pour les Witchers : ils sont eux même catalogués par la population comme éléments hautement subversifs, donc infréquentables. Notre héros Geralt commence l'aventure par une bonne petite amnésie comme seuls les Japonais osent encore en proposer dans tous leurs RPG. Non, ne partez pas ! ça s'arrange rapidement par la suite. Le prologue est l'occasion de prendre en main son personnage, sans passer par la case "création" puisqu'on incarne un homme au vécu déjà conséquent. L'intro nous montre Geralt affrontant une créature morte-vivante issue du croisement entre un crapaud, une hyène et Geneviève de Fontenay. Revenue d'entre les morts, la bestiole peu aimable au saut du lit ne se gène pas pour taillader délicatement la tronche de notre aventurier, le laissant sur le carreau. C'est sûr, question ambiance on n'est pas chez les Pokemons. Réveil difficile On prend les rênes après cet épisode douloureux, alors que la forteresse servant de Q.G. aux Witchers du pays est prise d'assaut par de mystérieux agresseurs. Gégé a un réveil pénible, la trogne comme un compteur, il n'a aucun souvenir récent et en plus son scooter est en panne. Pire, il a perdu la maîtrise de son légendaire maniement d'épée ainsi que toutes les recettes de mère-grand pour lancer ses sorts destructeurs. Il est entraîné urgemment par de prétendus amis dans la défense du château, dans une guerre opposant les humains à tous ceux d'en face. Bref, Geralt est mal. L'occasion pour le joueur de se lancer dans un didacticiel bien mené, de découvrir toute la beauté de ses décors et toutes les subtilités du gameplay. "The Witcher" offre un graphisme magnifique, évidemment pas du niveau des derniers FPS à la mode sur PC (Crysis, Timeshift, CoD4, Gears of War), ni même aussi sublime que pouvait l'être Oblivion en son temps. Mais le studio polonais de CDProjekt tire pleinement partie du moteur utilisé (celui de Neverwinter Nights 2) pour que l'environnement et les habitants soient vraiment bien détaillés, riches en couleurs, avec tous les effets tendance qui vont bien : ombres et lumières dynamiques, animations ragdoll, variations atmosphériques, textures riches, petits lapins courants dans la luzerne. La vue "isométrique" à la 3e personne est réglable sur deux hauteurs (caméra éloignée ou proche), complétée par une vue "par-dessus l'épaule", genre FPS console, qui s'avère peu pratique si on n'est pas habitué à ce mode de vision. Les auteurs ont pris le parti de proposer une aventure assez linéaire, cadrant avec le choix de conter le destin d'un être unique. C'est donc le récit qui est privilégié au détriment de la liberté d'action. Les premières heures de l'aventure sont très encadrées, impossible de quitter les sentiers pour batifoler dans les champs, et interdiction de franchir certaines portes verrouillées tant qu'on a pas rempli les conditions pour avancer. Cela refroidira à coup sûr les chantres du droit de circuler à sa guise. Killer Witcher La causerie, ça va cinq minutes, mais à un moment faut sortir le matos. Coté fritage les auteurs ont opté pour un système basé sur trois styles de combat différents à utiliser selon le profil de l'affrontement. Lorsqu'on tombe face à une brute épaisse, poussive mais puissante, on sélectionne d'un clic le mode "Strong" (mouvements amples plus lents mais percutants). Devant une petite teigne nerveuse, on bascule en "Fast" (gestes rapides pour prendre l'adversaire de vitesse). Enfin, quand on se retrouve seul contre un groupe, le bien nommé "group style" permet de faire virevolter son épée façon pales d'hélico. Geralt est défini par la poignée de caractéristiques que chacun connaît : Force, Intelligence, Dextérité et toute la clique. Les trois principales jauges concernent la Vitalité (qui diminue à chaque dégât physique reçu), l'endurance (pour l'utilisation des "Signs") et la Toxicité (contre l'abus de Potions de dopage). Un ennemi tué ou une quête validée engrange des points d'expérience, comme depuis 1000 ans dans les jeux de rôle, et chaque niveau donne l'occasion de distribuer des points de compétences pour améliorer son perso, avec un classement de "Bronze" à "Gold" notant l'efficacité et la puissance. L'alchimie et l'herboristerie constituent deux excellents passe-temps. On écume les échoppes, les coffres des donjons et les armoires des maisons à la recherche de livres donnant les ingrédients des recettes ou décrivant les éléments à prélever sur les plantes et les cadavres des animaux tués. On peut tenter des expériences en mélangeant des trucs au pif, mais le résultat peut s'avérer catastrophique. Finition exemplaire Le jeu est remarquablement stable, du moins dans sa version patchée (1.1a au moment du test). Reste quelques soucis, notamment pour les temps de chargement assez pénibles dès qu'on quitte un bâtiment, ou la simplification extrême de la gestion de l'équipement (trois armes, une armure et deux accessoires, on se croirait vraiment sur console). L'inventaire est quelque peu bordélique avec ses petites cases carrées minuscules. Pour détendre le joueur stressé on nous propose un Poker se jouant avec cinq dés. Bien qu'il soit très soigné dans sa présentation et qu'il fasse l'objet d'une série de missions facultatives, ce mini-jeu reste anecdotique. Tout comme l'inscription aux "Fight Clubs" locaux, où vous devrez battre à mains nues les Brad Pitt du coin. Marrant pour faire un break de deux minutes et gagner du fric facilement, ça ne va pas plus loin. Grâce à son ambiance mature et profitant du manque flagrant de RPG solo sur PC en cette fin d'année, The Witcher ose des choix culottés en cette période où l'on privilégie l'immensité et l'absence de dirigisme. Les auteurs ont choisi de faire exactement l'inverse, en s'appuyant sur une narration solide et en se concentrant sur l'essentiel : un jeu avec un vrai caractère, puisant son inspiration dans différents styles de jeux de rôle aussi bien PC que Consoles, Occidental que Japonais. Jamais manichéennes, les situations auxquelles nous sommes confronté réclament de faire des choix pas toujours évidents, avec en prime des commentaires très second degré de Geralt. Oscillant entre gris clair et gris foncé, le monde du Witcher est réaliste car ses habitants sont comme nous (mis à part quelques intrigues qui peuvent être vues comme des clins d'oeil satiriques aux autres productions Rolistiques PC, le choix "moral" se limitant à tuer un salaud ou le laisser vivre parce qu'il vous a aidé). Et en prime, il est impossible de jouer gagnant sur tous les tableaux, les indécis devront choisir leur camp. |
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